Métabolismes
LES MÉTABOLISMES
de quelques stupéfiants
Intérêt des métabolismes
Il n'est pas question d'être exhaustif quand il s'agit de faire l'inventaire des métabolismes car leur complexité saute aux yeux. En revanche, on se rend rapidement compte à partir de quelques exemples que l'identification d'une molécule en toxicologie n'est qu'une infime partie du problème. Dans un grand nombre de cas, il faudrait pouvoir identifier plusieurs molécules dérivées les unes des autres pour être sûr de son identification et consécutivement envisager la consommation d'un médicament ou d'un stupéfiant. L'identification d'une molécule isolée a fortiori à faible concentration est entachée d'une incertitude qu'il faut avoir constamment à l'esprit. Il y a des situations où rien n'est sûr surtout si il n'y a pas de raison que le médicament ou le stupéfiant ait été consommé (probabilité a priori ou prévalence faible). Cette différence entre la positivité et le diagnostic de consommation est parfaitement soulignée par l'existence de métabolites communs et par l'existence de molécules chimiques pouvant ressembler à des métabolites. En théorie, tous ces obstacles seraient surmontables si on associait une extraction chimique à haut rendement à une séparation chromatographique à haut rendement puis à une détection de masse à haut rendement. En pratique, c'est impossible à moins d'y consacrer une fortune en temps et en moyens matériels et humains et de rendre un unique résultat par an. Il faut donc recourir nécessairement en toxicologie aux notions de valeur prédictive positive (VPP) et de valeur prédictive négative (VPN). Sans quoi, il existe un risque permanent élevé d'affirmer à tort la consommation d'un produit en présence d'un signal isolé et faible. En revanche, la détection est quasi-certaine quand un signal est ample, répété et corroboré. Mais, malgré une détection quasi-certaine, la consommation du produit ne peut être affirmée que de manière probabiliste car il existe des cas qui ne correspondent à aucune consommation. Seule la prise en compte des VPP et VPN permet d'évaluer la part de cette incertitude diagnostique dans un résultat biologique. Evidemment, cet aspect des choses en toxicologie ne concerne pas vraiment la pharmacologie puisque la consommation du produit concerné par la pharmacologie (en suivi thérapeutique) est quasi-certaine. Dans ce cas, les possibilités d'erreur sont réduites et les conséquences quasi-nulles. La recherche de toxiques dans le sang, l'urine et quelques autres milieux biologiques quel que soit le contexte (médical, médico-légal, dopage, environnement etc.) ne se limite donc pas une question d'ordre technique mais doit donner lieu à interprétation des résultats au regard de la question posée.
Quelques exemples
Les ressources indispensables
Pour introduire le sujet, une excellente compilation de résultats classés en monographies:
Randall C. Baselt, Disposition of toxic drugs and chemicals in man, Biomedical Publications, 12ème Ed., 2020.
Les substances cannabinoïdes
LES CANNABINOÏDES
0, 25 à 0, 50% de THC en poids des feuilles textiles sèches
5% de THC en poids des feuilles actives sèches
15% de THC en poids des feuilles sèches (Californie)
15 à 35% de THC dans la résine
60% de THC dans l'huile
I. LES MÉTABOLITES
Plus de 60 cannabinoïdes naturels
(Dérivés phénoliques non azotés du benzopyranne)
Dans l'organisme, urine humaine :
l-δ-9-TRANS-TETRA-HYDRO-CANNABINOL
(THC)
traces
11-HYDROXY-THC
2%
8-β-hydroxy-THC
traces
8-β,11-di-hydroxy-THC
traces
8-α-hydroxy-THC
traces
ACIDE 11-NOR-THC-CARBOXYLIQUE
(THC-COOH)
80%
Dans la plante :
CANNABIDIOL
(qui se transforme en THC par pyrolyse)
δ-9-TRANS-TETRA-HYDRO-CANNABINOL
(THC)
δ-8-TRANS-TETRA-HYDRO-CANNABINOL
ACIDE 11-NOR-δ-9-TETRA-HYDRO-CANNABINOLIQUE
(THC-COOH)
(qui se transforme en THC par pyrolyse)
ACIDE δ-8-TETRA-HYDRO-CANNABINOLIQUE
(qui se transforme en THC par pyrolyse)
Cannabinol
Acide cannabinolique
Cannabigérol
Acide cannabigérolique
Cannabichromène
Acide cannabichroménique
Cannabicyclol
Acide cannabielsoïque
Chaîne propyle
Cannabidivarine
δ-9-Trans-Tétra-Hydro-Cannabivarine
Cannabivarine
Les substances cocaïniques
LA COCAÏNE
0, 25-0, 50% en poids des feuilles de coca
I. LES MÉTABOLITES
METHYL-BENZOYL-ECGONINE
BENZOYL -ECGONINE
80%
ECGONINE-METHYL-ESTER
5%
Anhydro-Ecgonine-Méthyl-Ester
Ecgonine
Nor-Cocaïne
Hydroxy-Cocaïne
Ecgonidine
Nor-Ecgonidine-Méthyl-Ester
Nor-Ecgonine-Méthyl-Ester
m-Hydroxy-Méthoxy-Benzoyl-Méthyl-Ecgonine
En présence d'alcool :
Cocaéthylène
2 à 10%
Nor-Cocaéthylène
Ecgonine-Ethyl-Ester
L'héroïne
L'HÉROÏNE
A partir de la morphine = 10% en poids de l'opium
3 fois plus puissante que la morphine
Pure: blanche, rose ou grise; impure: beige ou brune
Insoluble dans l'eau
I. LES MÉTABOLITES
3,6-DI-ACETYL-MORPHINE
0%
3-MONO-ACETYL-MORPHINE
(3-MAM)
6-MONO-ACETYL-MORPHINE
(6-MAM)
5%
MORPHINE
80%
Morphine-N-Oxyde
N-Nor-Morphine
Codéine
1 à 10%
Nor-Codéine
Les autres opiacés
LES AUTRES OPIACÉS
2. MORPHINE
Isolée de l'opium en 1803
Analgésique
Insoluble dans l'eau et l'éthanol
7,8-DI-DEHYDRO—4,5-EPOXY-17-METHYL-MORPHINANE-
3,6-DIOL
I. Les métabolites
MORPHINE
10%
MORPHINE N-OXYDE
<1%
N-NOR-MORPHINE
<1%
MORPHINE-3-GLUCURONIDE
54 à 74%
MORPHINE-6-GLUCURONIDE
<1%
MORPHINE-3-SULFATE
8 à 12%
Codéine
1 à 6%
Nor-Codéine
<1%
3. CODÉINE
Antitussif
METHYL-MORPHINE ou 3-METHOXY-MORPHINE
I. Les métabolites
CODEINE
5 à 17%
NOR-CODEINE
<1%
MORPHINE
<1%
CODEINE-6-GLUCURONIDE
32 à 46%
NOR-CODEINE-6-GLUCURONIDE
10 à 21%
MORPHINE CONJUGUEE
5 à 13%
Hydrocodone
Nor-Hydrocodone
6-α-Hydrocodol
6-β-Hydrocodol
4. CODÉTHYLINE
Antitussif
50 mg PO
Dose létale = 500 mg
T1/2 = 2h
ETHYL-MORPHINE ou 3-ETHOXY-MORPHINE
I. Les métabolites
CODETHYLINE
NOR-CODETHYLINE
MORPHINE
CODETHYLINE-6-GLUCURONIDE
MORPHINE CONJUGUEE
5. PHOLCODINE
Antitussif
20 mg PO, 2 fois par jour
Pic plasmatique de 26 à 44 µg/l pour 60 mg PO,
Pic plasmatique de 60 à 80 µg/l pour 20 mg PO en chronique,
Vd = 30 à 40 l/kg
Clairance = 137±34 ml/mn
T1/2 = 45 h
Biodisponibilité PO = 88%
3-O-(2-MORPHOLINO-ETHYL)-MORPHINE
(Morpholyl-Ethyl-Morphine)
I. Les métabolites
PHOLCODINE
24 à 35%
NOR-PHOLCODINE
MORPHINE
<1%
PHOLCODINE-6-GLUCURONIDE
13 à 17%
Des-Morpholino-Hydroxy-Pholcodine
Nor-Des-Morpholino-Hydroxy-Pholcodine
Hydroxy-Pholcodine
Oxo-Pholcodine
Nor-oxo-Pholcodine
6. BUPRÉNORPHINE
Analgésique et substitution
0,2 à 0,4 mg PO, 2 fois par jour
8 mg PO en une fois
Pic plasmatique de 0,7 µg/l pour 0,4 mg sub-lingual en 90 mn
Pic plasmatique en 5 mn par voie IM
Vd = 2,5 l/kg
T1/2 = 3 à 5 h
Biodisponibilité = 10% PO, 35 à 55% sub-lingual, 90% IM
BUPRENORPHINE
N-DES-ALKYL-BUPRENORPHINE
BUPRENORPHINE-3-GLUCURONIDE
N-DES-ALKYL-BUPRENORPHINE-3-GLUCURONIDE
7. MÉTHADONE
Analgésique et substitution
La l-méthadone est plus active
Soluble dans l'eau et l'éthanol
6-DI-METHYL-AMINO-4,4-DI-PHENYL-HEPTANE-3-ONE
I. Les métabolites
20 à 40% sont éliminés dans la bile par voie intestinale
L'EDDP et l'EMDP sont inactifs
Le méthadol et le nor-méthadol sont très actifs
METHADONE
5-50%
2-ETHYLIDENE-1,5-DI-METHYL-3,3-DI-PHENYL-PYRROLIDINE
(EDDP)
2-25%
2-ETHYL-5-METHYL-3,3-DI-PHENYL-PYRROLINE
(EMDP)
α-1-Méthadol
α-1-Nor-Méthadol
Les substances amphétaminiques
L'AMPHÉTAMINE
Métabolite de l'amphétaminil, clobenzorex, fencamine, fénéthylline, fenproporex, méfénorex, mésocarb, prénylamine.
I. Les métabolites
α-METHYL-PHENYL-ETHYL-AMINE
30%
NOR-EPHEDRINE
2%
4-HYDROXY-AMPHETAMINE
3%
Phényl-Acétone
1%
Acide benzoïque
4%
Acide hippurique
20%
Para-Hydroxy-Nor-Ephédrine
0,3%
LA MÉTHAMPHÉTAMINE
Métabolite de la benzphétamine, famprofazone, fenfénorex, sélégiline.
I. Les métabolites
α,N-DI-METHYL-PHENYL-ETHYL-AMINE
40%
4-HYDROXY-N-METHYL-AMPHETAMINE
10%
α-METHYL-PHENYL-ETHYL-AMINE
5%
Nor-Ephédrine
Phényl-Acétone
Acide benzoïque
Acide hippurique
Para-Hydroxy-Nor-Ephédrine
LA MDMA
Sérotoninergique
I. Les métabolites
3,4-METHYLENE-DIXY-METHAMPHETAMINE
4-HYDROXY-3-METHOXY-METHAMPHETAMINE
3,4-DI-HYDROXY-METHAMPHETAMINE
MDA
4-hydroxy-3-méthoxy-amphétamine
3,4-di-hydroxy-amphétamine
Acide méthylènedioxo-hippurique
2-hydroxy-4,5-méthylènedioxy-amphétamine
2,4,5-trihydroxy-méthamphétamine
2,4,5-trihydroxy-amphétamine