Un sportif doit-il être asthmatique pour avoir le droit d'utiliser des produits interdits comme le salbutamol et les corticoïdes ?

Monday, 6 April 2020 21:19


Lors des jeux olympiques d'hiver de Turin, 5,2% des sportifs avaient été autorisés par le C.I.O. à prendre un traitement pour l’asthme. En 2006, plus d’un dossier de demande d’autorisation d’utilisation à des fins thérapeutiques (AUT) sur deux déposé auprès de l’Agence Française de Lutte contre le Dopage (soit 789 dossiers) concernaient les bêta2-agonistes c'est-à-dire les médicaments prescrits pour l’asthme. Tous les sportifs ne déposant pas systématiquement une demande d’AUT, ces chiffres sous-estiment probablement le nombre réel de sportifs prenant ce type de traitement. Pour autant, au regard du nombre de licenciés en France (14 millions), le nombre de sportifs se déclarant asthmatique reste minime. Les concernant, on peut néanmoins s’interroger : Est-ce que la pratique du sport a été conseillée chez des sujets asthmatiques pour améliorer leur santé ? Est-ce que le sport entraîne la survenue d’asthme chez des personnes ayant des bronches saines ? Est-ce que les sportifs réalisent une fausse déclaration afin de bénéficier des effets des bêta2-agonistes et des corticoïdes ? On dénombre 10 à 15% d’asthme chez des sujets jeunes en France. Depuis de nombreuses années, la pratique d’une activité sportive leur est fortement recommandée. De ce fait, certains s’investissent dans la pratique de compétition et demandent ainsi une AUT. Chez des pratiquants non asthmatiques, certaines études montrent jusqu’à 50% d’asthme d’effort dans certaines disciplines et dans les populations pratiquant intensément. On connaît aujourd’hui le mécanisme qui provoque ce problème respiratoire. L’hyperventilation occasionnée par les entraînements répétés va entraîner une modification de la structure des bronches, ce qui va favoriser un spasme bronchique pour un effort donné et sous certaines conditions (air froid et sec…) Dans ce cas et pour cette population, on parlera de bronchoconstriction induite par l’effort plutôt que d’asthme d’effort. Enfin, il est évident que le sportif peut être tenté par la prise de médicaments bronchodilatateurs, espérant accroître sa fonction respiratoire. Or, celle-ci n’est aucunement améliorée chez un sujet présentant des bronches saines. Seuls des effets intéressants sur la performance au niveau du muscle squelettique ont été mis en évidence dans différentes études réalisées sur les bêta2-agonistes. Aujourd’hui, la demande d’AUT est un rempart aux excès, mais la formule abrégée qui a été retenue pour des raisons pratiques peut encore favoriser des dérives.


Performance et santé n°12, spécial dopage, réponse de M. le Dr Olivier Coste, médecin conseiller, DRDJS Languedoc-Roussilon.