Le cyclisme est-il le sport dans lequel on se dope le plus ?

Monday, 6 April 2020 21:19

 

Par définition, le dopage est une pratique secrète dont il est toujours difficile de connaître l’épidémiologie. Les contrôles antidopage positifs ne suffisent pas à déterminer le classement des sports les plus touchés par le dopage. Il ne faut pas, en effet, confondre dopage et positivité aux contrôles car nous savons très bien que les sportifs peuvent se doper (prendre des produits interdits) sans se faire contrôler et, à l’inverse, être contrôlés positifs sans avoir eu une réelle intention d’enfreindre la législation (complément alimentaire contaminé, manque de vigilance par rapport à une prescription médicale, etc.). Toutes les fédérations n’oeuvrent pas de la même manière pour démasquer les tricheurs. Le cyclisme est une des disciplines les plus impliquées dans la lutte antidopage. Certaines fédérations n’utilisent toujours pas les prélèvements sanguins pour détecter des infractions à la législation antidopage ce qui réduit les possibilités de détection des produits interdits. Des fédérations comme la fédération internationale de golf s’opposent à la mise en place de contrôles antidopage dans leur discipline. Toutes les disciplines sportives sont confrontées au dopage. Le dopage semble concerner la haute compétition et les sports à forte dépense énergétique. Pourtant les dix années d’écoute téléphonique au numéro vert Ecoute Dopage ont clairement montré que tous les sports sont concernés par la question du dopage. Le service reçoit régulièrement des appels concernant des sports moins médiatisés comme le tir à l’arc, le kayak, le polo, la pétanque, etc. (cf. rapports d’activités : www.ecoutedopage.com). Les produits concernés ne sont bien évidemment pas les mêmes que ceux utilisés en cyclisme ou en athlétisme mais il n’en demeure pas moins qu’il s’agit de substances interdites par la législation antidopage. Les médicaments peuvent, par exemple, être détournés de leur usage thérapeutique dans une perspective de réduction du stress et d’optimisation de la précision pour les sports d’adresse. Affirmer que le cyclisme est le sport où l’on se dope le plus est donc une idée reçue. On peut toutefois se demander pourquoi ce sport est autant stigmatisé. Cela s’explique sûrement par sa forte médiatisation qui expose de fait les contrôles positifs et les investigations policières en la matière. Mais on peut également souligner que beaucoup de cyclistes associent systématiquement leur pratique sportive à l’usage de produits. Détourner un médicament de son usage thérapeutique afin d’optimiser ses résultats est intégré comme faisant partie de la préparation sportive au même titre que la tactique de course, le matériel ou la technique. Les cyclistes sont devenus experts dans l’usage des médicaments pour soigner les petits bobos, éviter les douleurs, améliorer leurs performances. Cette forme de « culture du Produit » développée dans certains sports, et notamment dans le milieu cycliste, a probablement nourrit la stigmatisation déclenchée par les affaires de dopage. 


Performance et santé n°12, spécial dopage, réponse de M. Dorian Martinez, psychologue, numéro vert Ecoute Dopage.